Shining

De Stanley Kubrick
USA - 1980 - vost - 119' - Couleurs
Synopsis

Jack Torrance, gardien d'un hôtel fermé l'hiver, sa femme et son fils Danny s'apprêtent à vivre de longs mois de solitude. Danny, qui possède un don de médium, le "Shining", est effrayé à l'idée d'habiter ce lieu, théâtre marqué par de terribles évènements passés...

Critique

La caméra suit Danny avançant sur son tricycle dans les couloirs labyrinthiques de l'hôtel désert. Le bruit lancinant des roues s'interrompt quand il passe du parquet aux tapis, puis reprend. La musique - contemporaine et choisie avec soin - fait monter la tension. Au jeu admirable sur les sons s'ajoutent les flashes visuels - jumelles déchiquetées, litres de sang jaillissant de l'ascenseur - qui vous titillent sérieusement la moelle épinière, surtout si vous êtes seul devant votre téléviseur, entre chien et loup. Jack Nicholson, génial et grimaçant, serait-il derrière la porte ? Shining - le premier gros succès commercial de Kubrick - est d'abord un exercice de style, une « symphonie de la terreur » où le cinéaste, au sommet de son talent, substitue aux effets bâclés du film d'horreur classique toute sa science de la mise en scène, fondée sur l'utilisation quasi géométrique du décor. L'hôtel désert devient une sorte d'espace mental, où s'exprime de façon concrète le déséquilibre grandissant de son héros. La réflexion sur l'écriture-catharsis, chère à Stephen King, est finalement accessoire : Kubrick a d'abord voulu faire un grand film, à la fois adulte et qui fait vraiment peur. Pari réussi.

Aurélien Ferenczi, Télérama

***

 

Kubrick s'empare d'un banal roman d'horreur de Stephen King pour disséquer en vase clos le couple, la folie et l'impuissance créatrice. En perpétuelle recherche d'expérimentations, Kubrick décide, après les éclairages à la bougie de Barry Lyndon, d'utiliser la Steadicam, une caméra fixée sur harnais qui permet des mouvements d'une fluidité inédite, notamment lors de la poursuite finale dans le labyrinthe enneigé.

En exigeant de Jack Nicholson et de Shelley Duvall un jeu outré et grimaçant, Kubrick systématise son travail sur le visage humain transformé en masque et explore les mécanismes de la peur et de la violence. Attendu comme le film d'horreur définitif, Shining fut mal compris à sa sortie.

Malgré les visions cauchemardesques qui parsèment le récit et la convocation de folklores ancestraux et modernes du fantastique, Kubrick transcende une nouvelle fois les frontières du cinéma de genre et signe une œuvre cérébrale, effroyablement pessimiste.

Olivier Père, Les Inrocks

Projeté dans le cadre de

Du 18 Juillet 2018 au 14 Août 2018