Au nom du peuple italien
Un juge modeste et désabusé enquête sur la mort d'une jeune toxicomane. Ses soupçons portent sur un industriel d'extrême droite.
Dino Risi et ses scénaristes, Age et Scarpelli, s’attaquent à leur manière à un sujet « sérieux », à « l’une des plaies du pays ». L’histoire d’un affrontement entre un petit juge intègre et un industriel véreux, Au nom du peuple italien est construit sur plusieurs strates, entre la farce et la fiction politique.
Le récit d’Au nom du peuple italien oppose deux personnages : un juge incorruptible, Bonifazi, droit dans ses bottes, de gauche, qui rêve d’une Italie propre (Ugo Tognazzi), face à Santenocito, un richissime homme d’affaires véreux d’origine sicilienne, menteur, hâbleur, machiste, malhonnête (Vittorio Gassman, dans un de ses rôles favoris).
Le ton semble donné : d’un côté, il y a le bon justicier, et de l’autre l’escroc type, issu du boom économique italien de l’après-guerre par des moyens pas toujours très reluisants et dont l’héritier direct sera l’Homo berlusconus.
Or, petit à petit, Risi brouille les cartes. On retrouve une jeune prostituée morte, et Santenocito la connaissait… Une bonne occasion pour le juge de coincer ce représentant de l’Italie qu’il déteste. Sans jamais glorifier ou condamner tel ou tel, Risi met en avant les préjugés des uns et l’hystérie des autres. Jusqu’à aboutir à un final presque fellinien, d’un profond désespoir et d’une évidente misanthropie.
Jean-Baptiste Morain, Les Inrocks