Le Soldat disparu

De Frédéric Gonseth, Catherine Azad
Suisse - 2023 - vofr - 75' - Couleurs
Synopsis

L’Ukraine des campagnes sous les sirènes, les coupures de courant, les enterrements drapés de jaune et bleu, l’acharnement émouvant des mères et des épouses : ainsi naît un portrait décalé de ce pays en souffrance, mais d’une étonnante résilience, se découvrant capable de cohésion militaire tout en restant terriblement attaché à une démocratie en germe, celle-là même que le grand voisin est venu lui ravir…

Critique

Frédéric Gonseth et Catherine Azad arpentent l’Ukraine et les pays alentour depuis trente ans.  «C’est une longue histoire de films et de musique», commentent-ils en ouverture du Soldat disparu. Le cinéaste et sa scénariste remarquent l’ironie du destin. Car l’histoire est un éternel recommencement. Venus jadis documenter l’indépendance d’un pays, ils en sont restés obsédés par les déportés ukrainiens d’alors, les prisonniers de guerre soviétiques, les victimes du nazisme. Pour «apaiser ces millions de fantômes», le duo n’a cessé de filmer. Se sont bien sûr nouées des amitiés. Aussi, dès le printemps 2022, les Vaudois ont réagi à la guerre «en tricotant», selon leur formule, leurs précédents reportages dans «Ukraine, terre profanée», pour montrer l’évolution du pays dans sa construction d’une fragile démocratie. En octobre, les cinéastes sont repartis sur le terrain. Un réseau de solidarité fonctionne là-bas depuis 2014 et les premiers affrontements meurtriers. Ainsi, leur amie Olga a fait appel à ses amis «Frédéric et Catherine de Genève» pour venir en aide à son amie Iryna, qui a perdu la trace de son fils soldat fait prisonnier. Le malheur s’écrit comme une charade, un indice mène à un autre jusqu’au cul-de-sac. Ou à la solution. L’espoir réside dans l’échange de prisonniers mais pour pouvoir y songer, il faut que le soldat ait été enregistré auprès du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). À défaut, il disparaît dans un néant des plus inquiétants.  Conçu comme un reportage, «Le soldat disparu» fait intervenir divers membres du CICR engagés dans des opérations de terrain, acheminer des vivres ou des matériaux de construction, visiter les centres de détention sous haute surveillance. Là, les cinéastes ont enregistré des témoignages prévisibles sur les maltraitances de soldats, le déni du droit de parole, les menaces de rétorsion.  Alors qu’en novembre, devant les dirigeants du G20, le président Volodymyr Zelensky allait jusqu’à parler d’«autodestruction de la Croix-Rouge» pour fustiger son inaction, les responsables démentent tout en déplorant le manque d’accès aux prisonniers. En une petite heure balisée par la musique mélancolique d’Alexandre Cellier, «Le soldat disparu» ne résout rien tout en plongeant dans le bourbier d’un conflit qui s’enlise. 

Cécile Lecoultre, TdG

Projeté dans le cadre de