Une histoire provisoire

De Romed Wyder
Suisse, Luxembourg - 2022 - vost - 85' - Couleurs - Numérique
Synopsis

Une femme iranienne et un homme suisse louent une chambre dans le même Airbnb. Elle n’a pas envie de faire sa connaissance, met un foulard et utilise ainsi en sa faveur les préjugés occidentaux.

Ce n’était pas vraiment nécessaire, car il ne veut pas non plus faire sa connaissance…

Avec humour, le film joue avec les préjugés, les malentendus et les crises de vie des protagonistes. Malgré les différences culturelles, ce qui relie les gens est plus fort que ce qui les sépare.

 

Critique

Un huis clos entre deux, puis trois, personnes suite à une rupture avec un soi qui ne fait plus sens. Ce moment passager et déroutant, nécessaire à un renouvellement, est finement décrit dans ce long-métrage qui redonne aux détails leur force expressive. 

 

Une histoire provisoire certes, mais non moins déterminante. Celle de deux individus d'abord, Sacha, un publicitaire au sommet de sa gloire et Marjan, une Iranienne, tous deux en pleine crise existentielle. Elle, pour avoir suivi son mari en Suisse, pays et quotidien qui ne lui conviennent pas. Lui, parce que son travail et son ancienne relation ne font plus sens. Ainsi, l'un et l'autre se refusent à poursuivre une trajectoire menée par la seule force de l'inertie et y mettent fin brutalement. Le hasard voudra qu'ils cohabitent dans un Airbnb contre leur gré, du moins au début. Un moment parenthétique, de réclusion, entre un avant qui cherche à les retenir, un futur à imaginer. La présence de l'autre, pour les deux protagonistes, sera d'abord considérée comme envahissante, avant que l'individualité du premier et la froideur de la seconde laissent place à une attirance et curiosité mutuelles, facilitées par l'arrivée de Mina, une Américaine spontanée et joviale.

Les différences culturelles, autant de frontières qui deviendront une occasion de partage, s'expriment aussi par le jeu des protagonistes, notamment des deux actrices. Les regards, gestes et mouvements définissent le jeu de la talentueuse Pooneh Hajimohammadi, tandis que celui d'Elisabet Johannesdottir est plus expressif et entier. D'une simplicité, le film saisit finement ces moments de vie qui, s'ils ne s'inscrivent pas dans une durée – ce que symbolise également le discours de la préadolescente du supermarché soucieuse de constamment repenser la place de la marchandise dans les étalages –parviennent néanmoins à redonner du sens là où il venait à manquer.

Sabrina Schwob, Ciné-feuilles

Projeté dans le cadre de

6 Décembre 2022
Rencontre avec Romed Wyder