Lola vers la mer

De Laurent Micheli
France, Belgique - 2019 - vost - 90' - Couleurs - Numérique
Synopsis

Alors que Lola, jeune fille transgenre de dix-huit ans, apprend qu’elle va enfin pouvoir se faire opérer, sa mère, qui devait la soutenir financièrement, décède. Afin de respecter ses dernières volontés, Lola et son père, qui ne se sont pas vus depuis deux ans et que tout oppose, sont obligés de se rendre jusqu’à la côte belge. En chemin, ils réaliseront que l’issue du voyage n’est peut-être pas celle à laquelle ils s’attendaient…

Un récit bouleversant sur la transidentité, avec une Mya Bollaers excellente et un Benoît Magimel formidable. Un road-movie lyrique et enthousiasmant.

Critique
Lola, jeune transgenre en deuil de sa mère, prend la route avec son père, qui ne la comprend pas… Un road-movie lyrique et enthousiasmant.

La mère de Lola, adolescente transgenre de 18 ans qui s’apprête à se faire opérer, vient de mourir. Ce décès provoque les retrouvailles puis un drôle de voyage de Lola avec son père, qui continue à l’appeler Lionel. Le deuil, leur seul lien commun, sera le point de départ d’une reconstruction : en route vers la mer, la jeune fille existera enfin comme telle dans le regard paternel…

Porté par un désir assumé de sensibiliser le plus grand nombre à la trans-identité, Laurent Micheli emprunte pour ce road-movie de l’apaisement des chemins très fréquentés par le cinéma : disputes dans l’habitacle d’une voiture, étape nocturne dans une boîte de strip-tease, flash-back sur l’enfance qui s’invitent dans le récit. Mais, magie d’une écriture subtile et d’une mise en scène constamment inspirée, il ravive leur pouvoir d’émotion pour un mélo sans drame, volontiers cocasse, aux antipodes du Girl, de Lukas Dhont, au sujet voisin.

S’il établit comme héroïne cette jeune fille victime de transphobie ordinaire, le réalisateur refuse, pour autant, de regarder le père de haut, ce veuf perdu et finalement attachant. La mère est aussi du voyage, grâce à une urne funéraire, et à ce vieil iPod rempli des morceaux qu’elle aimait, offrant au film une BO aussi éclectique qu’enthousiasmante. Cette utilisation de la musique comme pulsation des sentiments (y compris Karma Chameleon, de Culture Club, qui occasionne une belle leçon de danse dans la cuisine d’une entraîneuse, au petit matin) évoque le cinéma de Xavier Dolan… Avec encore plus de lyrisme dans ses partis pris visuels, comme lors d’une séquence d’orage somptueuse, où le ciel s’accorde à des notes d’opéra. Ou lorsqu’un simple pied dépassant d’une couverture en velours rouge traduit toute la grâce féminine de Lola. Face à la jeune Mya Bollaers, véritable révélation, Benoît Magimel est formidable dans le rôle du père, avec sa gueule un peu cassée par le chagrin, ses yeux troublés par l’incompréhension, sa volonté maladroite de bien faire. Et ses regrets, peut-être, de n’être lui-même qu’un type sans réelle identité.

Guillemette Odicino, Télérama

Projeté dans le cadre de

19 Septembre 2020
Projections en collaboration avec ÉPICÈNE