Une colonie

De Geneviève Dulude-De Celles
Canada - 2018 - vofr - 102' - Couleurs
Synopsis

C’est la fin de l’été à la campagne, Mylia, 12 ans, doit quitter sa petite sœur Camille pour faire son entrée au secondaire. Cherchant sa place dans ce nouvel environnement étourdissant, elle y rencontre Jacinthe qui l’initie aux rites adolescents ainsi que Jimmy, un jeune autochtone farouche de la réserve voisine avec qui elle se lie secrètement d’amitié. À travers eux, elle tracera les contours d’une vie nouvelle. C’est l’âge des premières fois. 

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Critique

D’où te vient l’inspiration d’Une colonie ?

D’abord, Une colonie est la suite logique de mes deux précédents films. La coupe, un court métrage de fiction portant sur le passage de l’enfance à l’adolescence à travers une relation père-fille en garde partagé; puis Bienvenue à F.L., un long métrage documentaire sur une communauté d’adolescents dans le huis clos de leur école secondaire. J’ai débuté l’écriture d’Une colonie après La coupe : j’avais envie d’écrire une histoire autour d’une jeune fille du même âge, approfondir la thématique de la transition entre le monde de l’enfance et l’âge adolescent. En ayant passé plus de deux ans au sein d’une école secondaire et été en contact avec plusieurs jeunes qui se sont confiés à moi, j’avais de la matière pour nourrir l’écriture d’Une colonie. Ensuite, il y a certainement mon expérience à moi. J’ai été marquée par cette époque. J’avais envie de la revisiter, peutêtre pour faire la paix avec la préadolescente que j’ai été, à la recherche de repères dans un milieu qui lui semblait étranger. Oui il y a déjà beaucoup de films faits sur le sujet, mais il me semblait que l’image de l’adolescence qu’on en faisait m’apparaissait romancée. En m’approchant d’un mode documentaire, j’avais envie de faire un film à la hauteur de mon expérience et de celles des jeunes que j’ai rencontrés, sans fard ni censure, un portrait qui puisse être plus fidèle à cette réalité.

Tu dis t’intéresser aux rites de passage. Pourquoi t’intéresser à cet âge particulier 12-13 ans ?

Je voulais mettre en scène une enfant qui tranquillement glissait dans l’adolescence. Le choc, à mon avis, peut être brutal et plus marquant que la transition entre l’adolescence et l’âge adulte. Je l’ai vécu à mon époque, et ça semble toujours être le cas aujourd’hui : de plus en plus, on demande aux jeunes de vieillir vite. J’y note une certaine pression d’effacer toute trace de l’enfance encore visible, de casser l’image d’enfant que le corps véhicule. Ça amène les jeunes à adopter rapidement des comportements d’adultes, à changer de façon drastique. Et pour les filles, devenir une femme en endossant certains codes (sexualité active, rapport de séduction auprès de la gent masculine, style vestimentaire, maquillage).

Pourquoi avoir choisi de dépeindre cette réalité au sein d’une école secondaire ? Pourquoi plus particulièrement s’attarder au cours d’histoire ?

Je vois l’école secondaire comme une espèce de microcosme qui nous offre un miroir à plus petite échelle de notre société. Il se joue à l’intérieur des murs de l’école secondaire des rapports de pouvoirs importants; bien souvent, les groupes dominants rejettent la marginalité afin d’assoir leurs idéologies. Il faut s’y coller pour ne pas être mis à l’écart. Pour traiter du « vivre ensemble », j’ai souhaité ici revenir à la source, à un âge où l’on développe notre rapport à l’autre. Comme je m’intéressais à cette question, le cours d’« histoire et éducation à la citoyenneté » m’offrait l’occasion d’aborder l’idée de communauté dans un sens plus large, c’est-à-dire à travers les époques; des premières sociétés, en passant par le siècle des lumières et son humanisme, jusqu’à l’expansion européenne dans le monde. J’ai voulu, par ces renvois à l’ Histoire et ses grands courants de pensée, donner un prétexte pour réfléchir notre devenir commun, questionnant ce qui nous lie au sein de cette « colonie ». Dans l’écriture du projet, je me suis d’ailleurs basée sur le contenu de livres d’histoire encore en circulation et approuvés par le MEES (Ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur)

 

Entretien avec le réalisatrice extrait du dossier de presse