Une grande fille

De Kantemir Balagov
Russie - 2019 - vost - 130' - Couleurs - Numérique
Synopsis
1945. La Deuxième Guerre mondiale a ravagé Léningrad. Au sein de ces ruines, deux jeunes femmes, Iya et Masha, tentent de se reconstruire et de donner un sens à leur vie.
Critique

Après la caméra à l’épaule en mouvement permanent qui enserrait l’héroïne de Tesnota dans des cadres oppressants, la mise en scène est ici plus posée. Mais les plans-séquences, où la tension naît de la durée, n’en sont pas moins virtuoses, que le cinéaste filme des dialogues intimistes ou un accident de tramway avec des dizaines de figurants. Sous l’influence des grands maîtres de la peinture hollandaise, Kantemir Balagov compose une palette subtile de rouges et de verts pour exprimer à la fois l’antagonisme et la complémentarité de ses deux héroïnes, la corrosion de leurs rapports et l’espérance malgré tout.

Ces portraits de femmes blessées ne seraient pas aussi admirables sans les personnages secondaires que le réalisateur parvient à faire exister en quelques scènes inoubliables. Le médecin-chef victime de sa trop grande compassion pour ses patients, le vétéran paralysé qui refuse de devenir « l’enfant » de ses filles, le jeune puceau fou amoureux de Masha ou cette apparatchik qui a dû s’endurcir pour s’imposer dans un monde d’hommes : ils forment une humanité souffrante en quête de bonheur. Et nous bouleversent.

 Samuel Douhaire, Télérama