La petite

De Louis Malle
USA - 1978 - vost - 110' - Numérique
Synopsis
Au début du 20e siècle, à la Nouvelle-Orléans, un photographe et une adolescente qui vit dans une maison close vivent une histoire d'amour passionnée.
Critique

Premier film de la carrière américaine de Louis Malle, La Petite a disparu dans la tempête soulevée par sa présentation au festival de Cannes, en 1978. Scandale ! Il fait le portrait d'une enfant de 12 ans qui se prostitue dans un bordel. Mais le plus déstabilisant, c'est qu'il n'y a pas de scandale. Louis Malle filme comme une chronique paisible le quotidien de cette maison close de La Nouvelle-Orléans en 1917. Autour des belles court une gamine nommée Violet. C'est vrai qu'elle est très belle, cette petite, et bientôt sa mère l'invite à partager la vie des grandes : lors d'une grande fête au boxon, la virginité de Violet est vendue aux enchères quatre cents dollars.

Même dans ces moments où la gaieté des filles de joie devient aussi cruelle, Louis Malle refuse la dramatisation. Son regard peut sembler lisse, mais il est du côté de Violet et de tous ces enfants qui se blindent contre le pire avec le sourire. Celui de la ­petite est désarmant, le sordide semble glisser sur elle. Brooke Shields, qui fut la révélation du film, était alors d'une grâce plus bouleversante que celle de toutes les baby dolls. Mais il n'y a pas, d'angélisme ici, et le dernier plan sur elle laisse transparaître la désorientation, le ravage. Dans la ville du jazz, c'est à un pianiste que Louis Malle donne les mots de la vérité : « Ce monde cruel est un bordel où naissent des petits enfants. »

Frédéric Strauss, Télérama