Qu'elle était verte ma vallée

De John Ford
Etats-Unis - 1941 - vost - 118' - Noir et Blanc - Numérique
Synopsis

Huw Morgan, en quittant la maison familiale désormais vide, entreprend de raconter l'histoire de sa jeunesse. Dans une petite ville du Pays de Galles, un père et ses cinq fils travaillent à la mine de charbon et la vie quotidienne s’écoule paisiblement, rythmée par des habitudes devenues de vrais rites. Mais les conditions de travail deviennent de plus en plus difficiles et les fils décident de faire grève, contre l’avis de leur père… 

 

Critique

Le classique par excellence. Le film est tissé dans la même étoffe que celle de ces "nobles livres" (Stevenson, Dickens) que lit le jeune Huw pendant sa convalescence. Qu'elle était verte ma vallée est un roman d'apprentissage, une chronique familiale et sociale, et surtout l'évocation de certaines valeurs supposées éternelles ayant forgé une société. Le film trouve son originalité et et son émotion principale dans son rapport au Temps. La famille ici décrite (...) repose sur des valeurs et des rites qui semblent immémoriaux, mais l'extrême dureté du métier de la mine et les contraintes de la vie sociale les menacent constament de disparition et de d'extinction. (...) Dans son coeur et dans son âme, Ford se situe du côté des valeurs d'éternité. Par l'acuité de son regard et son sens de la justice, qui font de lui un témoin social de première grandeur, il appartient au présent, pétri de menaces et de questions. C'est la superbe composition de l'image, avec ses décors dont le plancher et le plafond sont visibles dans le même plan, qui exprime le mieux l'unité du monde, apparement indestructible, où Huw a passé sa petite enfance. Mais c'est la continuité du récit et la dramaturgie qui rendent compte de l'éparpillement de cette famille, de la souffrance cachée de ses membres et notamment de ces trois femmes auxquelles ne restent plus, à la fin de l'histoire, que les yeux pour pleurer.  L'oeuvre de Ford est impossible à classer dans ces catégories superficielles et souvent vides de sens que sont la droite et la gauche, l'optimisme et le pessimisme. Elle charrie, dans son lyrisme et sa générosité, les doutes, les regrets, les espoirs et l'écho sensible de tous les grands bouleversements de la société occidentale dans la première moitié du XXème siècle. Le tableau qu'elle en donne est semblable, par sa dimension et sa vérité, à celui que dressent Satyajit Ray de la société indienne et Ozu de la société japonaise. 

Jacques Lourcelles, Dictionnaire du Cinéma, 1992

Projeté dans le cadre de

9 Décembre 2018
Décembre 2018