A Child is Waiting

De John Cassavetes
USA - 1963 - vost - 102' - Noir et Blanc - Numérique
Synopsis

Dans une institution spécialisée qui accueille des enfants autistes et trisomiques, une professeur de musique, en désaccord avec les méthodes du directeur psychanalyste, s'attache à un enfant rebelle à toute vie de groupe.

Critique

C’est cette collision entre deux mondes qui fait tout le prix d’Un enfant attend, un film qui appartient autant à son studio qu’à Cassavetes, autant à Burt Lancaster et à Judy Garland qu’aux enfants qui peuplent les plans. Cassavetes est avec eux, auprès d’eux, leur confiant la ­mission d’instiller de l’imprévu à l’intérieur du film. Ce sont eux que sa caméra filme longuement, sidérée devant leur puissance d’apparition, leur innocence et leur vulnérabilité. Le film aurait très bien pu porter le titre de son film suivant, Faces (1968), ou encore s’appeler Love Streams, qu’il réalisera en 1983, car l’histoire est celle d’une femme qui cherche son monde d’Oz, un endroit où donner un sens à sa vie, et qui fera la rencontre d’un enfant qui attend d’être aimé. Là encore s’opposent la retenue des acteurs hollywoodiens et l’élan incontrôlable de ces corps d’enfants, qui débordent d’amour et manquent d’affection. Des corps qui appartiennent complètement au cinéma de Cassavetes, prophétisant à leur manière celui de Gena Rowlands que l’on croise dans le film, mais qui n’est pas encore la princesse effondrée d’Une femme sous ­influence. Sur le tournage, le cinéaste ­entrera en conflit avec Stanley Kramer, alors producteur du film. L’enjeu concerne le sens que l’on doit donner à la toute fin. La querelle est à l’image du débat qui fait rage dans la société ­concernant la meilleure manière de traiter les enfants handicapés. Kramer aura le final cut, et ­Cassavetes, qui reniera le film, expliquera que le montage de Kramer « affirme que les enfants attardés doivent rester dans des maisons spécialisées ». Difficile de ne pas voir, dans cette fin ­voulue et contrariée et dans le portrait d’un enfant qui ne pense qu’à s’enfuir pour étreindre le réel et ses parents, une façon pour­ ­Cassavetes d’orchestrer son adieu au système des studios.

Murielle Joudet, Le Monde