Les nerfs à vif

De Jack Lee Thompson
Etats-Unis - 1962 - vost - 105' - 35mm
Synopsis

Max Cady vient de passer huit ans en prison pour agression sexuelle. Il retourne dans la ville où il compte retrouver le témoin de son forfait qu'il tient pour seul responsable de sa condamnation : l'avocat Sam Bowden. Tranquillement, Max Cady l'avertit qu'il est venu pour se venger, que son châtiment sera terrible et qu'il n'epargnera ni sa femme ni sa fille...

Critique

Les Nerfs à vif (Cape Fear, 1962), est un solide thriller qui permet de frissonner agréablement. C’est la plus évidente (même si elle est relative) réussite de Jack Lee Thompson, cinéaste anglais exilé à Hollywood où à partir du succès des Canons de Navarone il enchaînera une profusion de films commerciaux, pas toujours aussi nuls qu’on l’a dit mais sans aucune ambition, véhicules peu reluisants pour Anthony Quinn (Passeur d’hommesL’Empire du Grec) ou un Charles Bronson en fin de carrière pour Dino De Laurentiis ou Golan-Globus (de Monsieur Saint-Yves et Le Bison blanc jusqu’à Kinjite, sujets tabous, son redoutable dernier film produit pour Cannon). Anticipant ses polars douteux des années 80 (Le Justicier de minuit, dans lequel Bronson traquait un serial killer naturiste), Les Nerfs à vif est déjà un film noir sécuritaire qui baigne dans une phobie inquiétante de l’Autre.

En l’occurrence Robert Mitchum, un ancien détenu désirant se venger du témoin qui huit ans auparavant l’a envoyé en prison, pour une affaire de viol. Mitchum interprète avec gourmandise ce personnage de corrupteur, incarnation paillarde et brutale du Mal, souvent filmé torse nu, au cas ou on n’aurait pas remarqué sa bestialité. De toutes façons, tout le monde est antipathique dans Les Nerfs à vif. Mitchum, en diablotin goguenard, n’est vraiment pas sortable. Donc pas d’apologie du Mal. Quant à sa proie Gregory Peck, raide comme un piquet, il est impossible de s’identifier ou d’éprouver la moindre compassion pour son personnage d’avocat chiant comme la pluie qui craint pour sa famille, maintenant que le fauve est lâché. Sa famille, parlons-en : un épouse effacée, une fillette horrible, sorte d’adulte miniaturisé. Une vision totalement déprimante et pas forcement volontaire. Le film, parabole sur la contamination (et la séduction) du Mal, décrit déjà un monde pourri par les entorses et les arrangements (avocat véreux, flic conciliant, détective adepte de la manière forte…). Lorsque Peck décide de passer du côté de la légitime violence, en optant pour une justice privée en face de la léthargie de la loi, il est bien peut convaincant, tant comme personnage que comme interprète. Au moment de l’ébauche de transfert entre les deux ennemis dans un duel nocturne et aquatique, Peck sort soudain de sa torpeur pour sombrer immédiatement dans la grandiloquence. Que reste-t-il des Nerfs à vif, hormis la composition amusante de Mitchum ? La musique de Bernard Herrmann, qui deux ans après Psychose réutilise la stridence des violons pour créer un climat d’angoisse nettement plus moderne que les mouvements de caméra de Lee-Thompson.

Olivier Père, Arte

Projeté dans le cadre de

Du 30 Janvier 2017 au 14 février 2017