Le Carrefour de la mort

De Henry Hathaway
Etats-Unis - 1947 - vost - 99' - Noir et Blanc
Synopsis

Sans le sou, Nick Bianco décide de cambrioler une bijouterie pour offrir un Noël décent à sa famille. Arrêté par la police, il se voir proposer par l'assistant du District Attorney Louie D'Angelo une réduction de peine s'il dénonce ses acolytes. Nick refuse, pensant que ses amis aideront sa famille à survivre.
Apprenant trois ans plus tard que sa femme s'est suicidée et que ses deux filles ont été placées dans un orphelinat, il se met à table, et recouvre sa liberté. Alors qu'il tente de reconstruire sa vie loin du milieu du crime, Nick apprend que le psychotique Tommy Udo, qu'il a pourtant dénoncé, est en liberté, sur ses traces...

Critique

La sobriété exemplaire du récit, l'équilibre et la sérénité du style de Hathaway, l'application méthodique du parti pris réaliste et documentaire adopté par la Fox dans ces années-là (extérieurs réels à New York et dans diverses prisons dont Sing Sing, absence de musique, etc.) ne doivent pas nous faire croire à une œuvre simple et claire. 

Car ce film noir sans atmosphère onirique, sans femme fatale, sans plongée dans le subconscient des personnages, appartient cependant de plein droit au genre par sa profonde ambiguïté. Laissons de côté le personnage, resté célèbre, du tueur ricanant et monstrueux incarné par Richard Widmark que cette première interprétation saisissante propulsera immédiatement au rang de vedette. (Notons seulement que cette interprétation prend encore plus de relief du fait de la sobriété générale du film.) L'ambiguïté concerne Nick Bianco (Victor Mature) et tout ce qui l'entoure. Est-il bon, est-il méchant ? Est-il un infâme mouchard ou bien une victime de la société, de la police et de la justice ? L'assistant du procureur qui lui parle avec une sollicitude presque paternelle est-il un humaniste ou un roué cherchant seulement à obtenir des aveux ? Entre ses mains, doit-on considérer Nick Bianco comme sa dupe, comme un vengeur qui ne lésine pas sur les moyens ou simplement comme un homme désespéré et aux abois ? L'étonnante dignité de I'interprétation de Victor Mature ajoute encore du mystère — ces questions dont la réponse sera laissée à la libre appréciation du spectateur. Et c'est bien là un des triomphes spécifiques du film noir que d'abandonner le spectateur, au terme d'un récit apparemment limpide, en pleine perplexité morale.

Dictionnaire du cinéma, Jacques Lourcelles

Projeté dans le cadre de

Du 30 Janvier 2017 au 14 février 2017