L'Etage du dessous

De Radu Muntean
Roumanie - 2015 - vost - 93' - Couleurs
Synopsis

En rentrant chez lui, Pătrașcu perçoit derrière une porte au deuxième étage de son immeuble les bruits d’une violente dispute amoureuse. Quelques heures plus tard le corps d’une femme est découvert. Ses soupçons se portent sur Vali, le voisin du premier. Et pourtant Pătrașcu ne se rend pas à la police... même lorsque Vali commence à s’immiscer dans sa vie et dans sa famille.

 

 > Article paru dans Le Temps du 4 mai 2016

 > Article paru dans Scènes Magazine de mai 2016

 > Article paru dans L'Hebdo du 4 mai 2016

 > Article paru dans Le Courrier du 6 mai 2016

Critique

C'est l'histoire de Patrescu, quidam flou, placide, sans qualités particulières. On le voit courir au début du film avec son chien, remonter tranquillement l'escalier de son immeuble, être interpellé furtivement par un tapage, des cris, des menaces, dans l'appartement de la jeune femme, à l'étage inférieur de chez lui. Il a juste le temps d'entrapercevoir un autre voisin en sortir. Le lendemain, voilà qu'il apprend le meurtre de la voisine d'en dessous. Un flic fait le tour des appartements pour savoir si quelqu'un a entendu ou vu quelque chose. Et notre homme ne dit rien.

Par lâcheté ? Apathie ? Calcul ? Difficile de savoir tant Radu Muntean, ­cinéaste roumain dont on avait déjà beaucoup aimé Boogie et Mardi, après Noël, a l'art de tourner autour du pot, non sans une froide ironie, comme si l'essentiel n'était pas au centre mais à sa périphérie. De là les tours et ­détours, allers-retours incessants, où l'on ne quitte jamais d'une semelle ce Patrescu, père de famille ventru, ­occupé à de multiples tâches domestiques et professionnelles. Préoccupé aussi — forcément, même s'il en parle très peu —, le meurtre le « travaille », si l'on peut dire. C'est sans doute pourquoi une large part du film est surtout consacrée à son activité pour le moins opaque d'intermédiaire entre des particuliers et une société d'immatriculation de voitures. Ce à quoi l'on assiste est une ronde infernale, dans l'univers kafkaïen de la bureaucratie, qui se confond avec celle d'un homme qui tente de trouver une issue de secours, plus ou moins honorable.

Pas toujours simple à déchiffrer, mais L'Etage du dessous, mis en scène avec une rigueur et un sens de la ­cadence forçant le respect, captive comme une bombe à retardement.

Jacques Morice, Télérama