22 Septembre 2025

Chaire Yves Oltramare

THE LOST OKOROSHI de Abba Makama - en présence de Alessandro Jedlowski !

La chaire Yves Oltramare Religion et politique dans le monde contemporain a pour mission d'apporter une contribution scientifique majeure à l'analyse de l'impact des rapports entre religion et politique sur l'évolution des sociétés et du système international.

Elle doit contribuer au renforcement du dialogue et à la recherche de réponses aux problèmes résultant de ces rapports, notamment à travers une interaction forte avec les milieux d'experts et les actrices et acteurs internationaux concernés (gouvernements, organisations non gouvernementales, etc.) par l’organisation d’un colloque annuel et de cycles de conférences publiques. Depuis 2015, le titulaire de la chaire est Jean-François Bayart, professeur d'anthropologie et sociologie

Nous avons le plaisir de vous annoncer le lancement de notre cycle « Cinéma, religion et politique » qui, dans la continuité de notre programmation des années antérieures, s’interrogera sur la contribution du Septième Art à une meilleure compréhension des rapports entre le religieux et le politique dans le monde contemporain.

Nous travaillerons en partenariat avec les Cinémas du Grütli, à Genève, que nous remercions de leur précieux concours.

Selon les séances, d’autres institutions, universitaires ou culturelles, se joindront à nous. La première projection, le lundi 22 septembre, à 20h30, se tiendra ainsi en coopération avec le Geneva Africa Lab de l’Université de Genève, avec lequel nous organisons déjà – vous le savez – un cycle de conférences « Religion et politique dans le monde contemporain » :

The Lost Okoroshi
(2019), d’Abba T. Makama

Suivi d’un débat introduit par Alessandro Jedlowski (maître de conférence à Sciences Po Bordeaux et membre du laboratoire Les Afriques dans le Monde) et par Jean Perret (critique et professeur de cinéma)

Réalisé par Abba T. Makama, figure centrale du cinéma nigérian indépendant, The Lost Okoroshi (2019) est une œuvre singulière qui mêle spiritualité, satire sociale et esthétique afrofuturiste. Makama, également connu pour Green White Green (2016), est membre du collectif Surreal 16, qui milite pour un cinéma africain audacieux, affranchi des codes commerciauxqui dominent les écrans nigérians.

Le film suit Raymond, un agent de sécurité désabusé, hanté par des rêves peuplés de masques traditionnels. Un matin, il se réveille transformé en Okoroshi, une figure masquée issue de la culture igbo. Muet et vêtu de raphia violet, il erre dans Lagos, produisant une rencontre ironique et improbable entre modernité urbaine et mythes ancestraux. À travers cette métamorphose, Makama interroge la perte de repères culturels dans une société nigériane en pleine mutation.

Dans un paysage cinématographique nigérian dominé par Nollywood et ses comédies romantiques à succès (Wedding Party, Isoken), The Lost Okoroshi se démarque par son ton semi-comique et sa narration onirique. Le film refuse l'effacement des « traditions » au profit d’un consumérisme globalisé, et réhabilite les masques, souvent diabolisés par les missionnaires occidentaux et par les Églises pentecôtistes locales, comme entités bienveillantes et porteuses de mémoire.

Présenté au TIFF et au BFI London Film Festival, le film a trouvé une audience internationale grâce à Netflix et Amazon Prime. Il s’inscrit dans une nouvelle vague de cinéma nigérian qui revendique ses racines tout en explorant des formes hybrides, d’un point de vue esthétique comme en termes de contenu. Makama y célèbre la fluidité des cultures et affirme que nos ancêtres ne sont jamais vraiment partis — ils attendent simplement qu’on les écoute à nouveau.

 

Alessandro Jedlowski est maître de conférences en sociologie politique et en études africaines à Sciences Po Bordeaux et anthropologue des médias de formation. Ses recherches portent principalement sur les industries audiovisuelles africaines (en particulier la Nollywood nigériane), la relation entre médias et migrations, et les circulations culturelles Sud-Sud. Il a publié de nombreux articles sur ces sujets dans des ouvrages collectifs et des revues internationales telles que Television and New MediaTheory, Culture and Society, Politique Africaine et African Affairs.

Jean Perret est critique et professeur de cinéma. Créateur de la Semaine de la Critique au festival de Locarno, ancien directeur du festival Visions du Réel de Nyon, il a dirigé le département Cinéma de la Haute Ecole d’Art et de Design (HEAD) de Genève, de 2010 à 2019. Parallèlement à ses enseignements à l’étranger, il collabore à différents médias, au journal trimestriel Couleurs des jours et à la revue cinématographique en ligne filmexplorer.ch

Le mardi 21 octobre, à 20h, nous présenterons In Viaggio (2022) de Gianfranco Rosi, et le mercredi 26 novembre, à 20h, Durakovo. Le Village des fous (2008) de Nino Kirtadze (en présence de la réalisatrice).

C’est bien sûr l’amour du cinéma qui nous réunira. Mais il s’agira aussi de réfléchir avec lui, et grâce à lui, à la problématique de la Chaire, en contrepoint de ce que nous apportent nos conférences et notre Rencontre annuelle, grâce à un débat qu’animeront des chercheurs, des critiques, des réalisateurs, et qui nous permettra d’apporter une contextualisation politico-historique du film projeté ; de réfléchir à la forme de l’essai, à l’interface du Septième Art et de l’écriture en sciences sociales ; de trouver dans les films une source d’inspiration pour la recherche en sciences sociales ou pour l’engagement politique, civique ou religieux.

Nous espérons vous retrouver nombreuses et nombreux aux Cinémas du Grütli de Genève pour le lancement de ce nouveau cycle de la Chaire, dès ce lundi 22 septembre à 20h30, pour découvrir le cinéma nigérian, si mal connu en Europe.

-Jean-François Bayart

 

 

Programmation