Goodbye Julia
Dans son premier long-métrage distingué par le Prix de la Liberté à Cannes, Mohamed Kordofani raconte l’amitié de deux femmes que les inégalités de classes et les origines opposent. À travers leur intimité, le réalisateur soudanais révèle l’ostracisme qui persiste dans son pays. D’une intense beauté et porté par des actrices remarquables, un film sensible qui défend l’ouverture et l’émancipation.
Au milieu des années 2000, le Soudan est toujours en proie au conflit divisant le Nord et le Sud. Le pays s’apprête à se déchirer définitivement en deux. Alors que les émeutes se multiplient dans la capitale Khartoum, deux femmes vont se rencontrer: Mona, ancienne chanteuse nord-soudanaise, et Julia, jeune mère originaire du Sud. Devenue femme au foyer aisée, la première réside dans un lotissement confortable avec son mari qui dirige une menuiserie. La seconde vit dans un quartier bien plus modeste, avec son fils de cinq ans et son époux. Pour lui venir en aide à la suite d’un drame, Mona engage Julia comme domestique. Une amitié se tisse entre elles, mais un secret plane sur leur relation.
Produit par Amjad Abu Alala, révélé avec le poignant You Will Die at 20, Goodbye Julia est le premier long-métrage soudanais sélectionné en compétition à Un Certain Regard à Cannes. Mis en scène avec finesse par Mohamed Kordofani, ingénieur aéronautique devenu cinéaste, le film explore les tensions du Soudan à travers un duo incarné par deux actrices exceptionnelles: Julia est interprétée par Siran Riak, qui infuse à son personnage une fierté magnifique, et Mona est jouée par Eiman Yousif, qui exprime à merveille sa mélancolie. En creusant leurs dilemmes moraux au cours d’une tragédie hantée par la culpabilité et l’Histoire en marche, Kordofani met en lumière une société où se perpétuent les discriminations et où les femmes sont étouffées par des contraintes sociales, culturelles et religieuses absurdes. Il signe un film subtile et sensible mêlant l’intime et le politique.