22 Mars 2024

Avant-première de LES MURS DE BERGAME

vendredi 22 mars à 19H30 en présence du réalisateur italien Stefano Savona !

Avant-première de LES MURS DE BERGAME vendredi 22 mars à 19H30 en présence du réalisateur italien Stefano Savona !

Bergame, mars 2020. La ville, dans ses murs, est un corps malade. Les rues se sont vidées, les échanges ont été réduits à néant, les rencontres interdites. A l'hôpital, dans l'obscurité de la nuit, il y a les corps paralysés de ceux qui ne peuvent plus respirer. Médecins et infirmières sont les gardiens de ces corps à consoler, à réanimer, à endormir, à éliminer, des corps qui portent en eux des fragments de souvenirs qui émergent des tréfonds de la conscience.
Après les cauchemars de cette nuit sans fin, les survivants se réveillent dans une ville inconnue. Ils cherchent la confrontation et le réconfort sur les visages qui se cachent derrière les masques. Dans leurs silences, ils éprouvent le besoin de trouver les mots pour commencer à partager ce qui leur est arrivé, leur gratitude et leur culpabilité d'avoir survécu.

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Stefano Savona sur LES MURS DE BERGAME :

"Il y a trois ans, en mars 2020, nous avons traversé une Italie déserte pour arriver à Bergame au milieu d'une crise sans précédent. Pour une fois, je n'étais pas parti seul avec ma caméra pour tenter de raconter - comme je l'avais fait pour la révolution en Egypte ou l'invasion israélienne de la bande de Gaza - une réalité complexe, un conflit, une zone de crise. Pour une fois, j'étais accompagné d'un groupe de jeunes cinéastes, anciens élèves du cours de documentaire du CSC de Palerme, avec lesquels nous allions essayer de faire quelque chose de totalement nouveau pour moi, ou plutôt pour chacun d'entre nous : multiplier les points de vue pour essayer de raconter en chœur une réalité multiforme et complexe, celle d'une ville entière qui se trouve, du jour au lendemain, frappée par une catastrophe imprévue et imprévisible, face à laquelle toutes les certitudes se sont effondrées et nous nous sommes retrouvés totalement pris au dépourvu.

Sur la pointe des pieds, nous avons commencé à filmer la vie de ceux qui, au péril de leur vie, tentaient d'affronter, de comprendre et de surmonter l'urgence qui nous touchait tous. Notre pari était de restituer les mouvements d'une communauté en résistance. Chaque soir, pendant plusieurs mois, nous nous sommes réunis pour regarder les images que nous avions recueillies, en essayant de trouver les liens invisibles qui les unissaient, comme les rues et les routes d'une ville le font avec les gens. Puis nous nous sommes laissés guider le long des murs de Bergame, jusqu'à un endroit que nous avons affectivement baptisé "la Montagnola". Dans ce lieu physique, un coin de jardin creusé au-dessus d'un ancien bastion des murs monumentaux de la ville, toutes les histoires que nous avons interceptées, ainsi que leurs protagonistes, ont pu se rencontrer, raconter leurs histoires et découvrir qu'elles étaient similaires ou différentes des dizaines d'autres histoires que la pandémie avait tenté d'effacer. Lors de nos rencontres à la Montagnola, nous avons vu une communauté reprendre lentement la parole, d'abord avec pudeur et crainte, puis de plus en plus avec la conscience que ce n'est qu'à travers cet effort pour trouver un moyen de se raconter ce qui s'est passé pendant les semaines d'isolement, de peur et de deuil, que la ville pourra commencer à guérir ses traumatismes et que ses habitants retrouveront le sens de l'être ensemble.

Pendant deux ans encore, nous sommes retournés à Bergame pour documenter ce rituel collectif de réélaboration du deuil que nous avions vu naître et dont ce film-mémorial se voulait le porte-parole. Le besoin que j'avais ressenti dès le départ de multiplier les points de vue de l'histoire du film s'est certainement heurté à la nécessité de réussir à maintenir une forte unité de vue d'ensemble. Cela n'a pas été facile, mais si nous avons réussi, et ce n'est pas à nous d'en juger, c'est pendant les longs mois que nous avons passés tous ensemble à Bergame, tous les huit travaillant comme un seul corps, passant beaucoup plus de temps à regarder ensemble ce que chacun d'entre nous avait tourné, plutôt qu'à tourner. Et cela n'a été possible que parce que cette pratique collective était ce qui avait caractérisé notre travail ensemble pendant les trois années à l'école documentaire. C'est pourquoi je pense que, bien qu'il soit le fruit d'un travail de groupe, ce film est peut-être le plus personnel et le plus intime de tous ceux que j'ai réalisés jusqu'à présent."