Memoria del saqueo

De Fernando Solanas
Argentine - 2004 - vost - 128' - Numérique
Synopsis

Durant ces 25 dernières années, de la dictature militaire à aujourd'hui, l'Argentine a subi l'un des effondrements économique et social les plus brutaux qu'un pays ait pu connaître en temps de paix. Ce pays riche et sa population ont vécu dans leur chair et de plein fouet l'ensemble des traumatismes dénoncés par les altermondialistes : ultralibéralisme éhonté, spoliation des biens de l'état, explosion de la dette extérieure, corruption politico-financière massive?

Tout cela avec l'aide et la complicité de multinationales occidentales et sous le regard bienveillant des institutions internationales. Incarnée par des hommes comme Carlos Menem, cette politique de la terre brûlée a abouti à un véritable génocide social, un cataclysme inouï fait de famine, de maladies et de vies humaines sacrifiées. Memoria del saqueo dénoue un à un les mécanismes qui ont conduit à cette catastrophe. Ce film est dédié à tous les Argentins qui ont résisté avec dignité et courage durant toutes ces années et qui souffrent de la crise : parce que les chemins de la misère sont encore plus inacceptables lorsqu`ils sont prévisibles et tracés en terre fertile.

Critique

Dans la vague d'extrême politisation actuelle, Mémoire d'un saccage tombe à pic pour rappeler qu'il n'y a pas que Bush dans la vie. Il y a aussi l'Amérique du Sud et l'Argentine en l'occurence, dont le bilan général est, à l'aube du nouveau sciècle, franchement désastreux. Pour mieux expliquer l'ampleur du désastre : Fernando Solanas nous livre une oeuvre à son image, celle d'un des rares cinéastes actuels dont le travail avance avec un engagement politique actif de député et de protestataire, lui ayant déjà attiré de gros ennuis. Ainsi, Mémoire d'un saccage est un croissement entre documentaire et film d'auteur assez proche de FAHRENHEIT 9/11 de M. Moore (l'humour en moins), avec lequel il partage surtout une subjectivité pamphlétaire entièrement revendiquée. Dans la ligne de mire : l'ex-président Carlos Menem et son ministre de l'économie Cavallo donnés comme principaux responsables d'une politique, ironiquement appelé "miracle argentin" ayant mené un pays à l'immense potentiel naturel au bord du gouffre social. Comme Menen n'est plus au pouvoir et que l'actuel président, N. Krichner, recueille plutôt les sondages de Solanas, le long-métrage tient plus du constat, dressé en dix points (donc sous la forme d'un réquisitoire), alternant les frcanches accusations et une exposition un peu plus posée, des faits. Pour bien faire passer son message, le cinéaste martèle aussi l'écran de slogans chocs, destinés à souligner la corruption d'un régime particulièrement cynique. Et il est vrai que le bilan est accablant, mélangeant un libéralisme poussé aux dernières limites avec une vision singulière de l'État assumant quantité de dettes et de problèmes qui devraient plutôt revenir aux grandes banques internationales qu'à un peuple dans un dénuement alarmant. Pour le réalisateur, Menem, De La Rua et les autres furent en fait les laquais du FMI et des corporations étrangères, faisant passer les intérêts de ces derniers avant ceux de leurs citoyens électeurs. Si le film, grâce à des images choquantes et un sérieux solennel, semble de prime abord plus digne de confiance que le manichéisme évident d'un Moore, les méthodes de Splanas peuvent énerver. Notamment sa propension à commencer chaque point par de violentes accusations, avant d'expliquer, parfois succinctement les faits justifiant ses diatribes. Certaines démonstrations peuvent ainsi, au milieu des insultes et réprimandes, sembler un peu incomplètes par manque de précision. Mais, ces défauts mineurs ne nuisent pas à la force indéniable d'un fllm-plaidoyer partrticulièrement déprimant, se concluant néanmoins par une note d'espoir bienvenue, sur un peuple ayant finalement, bien qu'un peu tard, pris son destin en mains. 

Les nouvelles fiches du cinéma, l'Annuel du Cinéma 2005, Simon Gutman

Projeté dans le cadre de

Du 9 février 2022 au 3 Mars 2022