Zindeeq

De Michel Khleifi
Palestine, Belgique, Royaume-Uni - 2010 - vost - 83'
Synopsis

Un réalisateur palestinien revient à Nazareth pour y enterrer son oncle et faire un film sur la naissance de l'Etat d'Israël. Volage, il entretient avec son assistante une relation amoureuse chaotique, à l'image de sa ville natale où il va errer le temps d'une nuit, pleine de dangers…

Critique

L'auteur de Noces en Galilée et Le Cantique des Pierres (tous deux présentés à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes et bientôt disponibles en DVD) trouve dans le personnage de cinéaste interprété par Mohammad Bakri, son alter ego. Puissamment magnétique, avec son regard bleu acier et son visage marqué, l'homme se bat contre ses démons. Il y a ce Dieu auquel il ne croit pas. Son impiété en porte-étendard, il refuse d'entrer dans l'église où se déroulent les funérailles.

Il y a aussi cette ville qu'il ne reconnaît plus, alors qu'il y est né et que sa famille y vit encore. Livré à la violence et aux règlements de compte, Nazareth a oublié les siens. Le temps d'une nuit d'épouvante, l'homme déambule dans les rues, foisonnantes de dangers, et ses divagations symbolisent le sort des Palestiniens, en quête de territoire. Jusqu'à l'épuisement, il va chercher une chambre d'hôtel, à travers toute la ville. On la lui refusera systématiquement, au motif de sa nationalité.

Toute l'absurdité d'une situation d'occupation éclate avec l'épreuve insensée d'un homme, bientôt aux abois dans sa propre ville natale. L'appel lancinant du foyer se manifeste alors. Le personnage entreprend de revenir dans la maison familiale, tandis qu'une vendetta rend les rues particulièrement insécures. Le retour dans la maison abandonnée, ouverte aux squatteurs, constitue sans doute le plus beau moment du film. L'émotion, quelque peu bridée par une mise en scène figée, s'exprime à ce moment précis avec l'apparition du fantôme de la mère. Mais ce moment de grâce n'empêchera pourtant pas le fils de continuer à souffrir du mutisme obstiné dans lequel ses parents se sont enfermés, relativement aux événements de 1948.

C'est cette blessure que met en scène Michel Khleifi. De la figure maternelle aux inconnues que séduit ce Don Juan moderne, le féminin est au cœur du film. Les belles comédiennes que met en scène Michel Khleifi adoucissent le contexte délétère où évolue le héros traqué. (…) C'est la signature de Michel Khleifi qui a souvent mêlé, dans ses films, le politique à l'exaltation poétique. (…) En résulte un film hiératique mais qui métaphorise avec intelligence la souffrance de ceux qui vivent le drame du conflit israélo-palestinien de l'intérieur.

Sandrine Marques, Le Monde

Projeté dans le cadre de

Du 19 février 2013 au 28 février 2013