Barbara

De Christian Petzold
Allemagne - 2012 - 105'
Synopsis

 Eté 1980. Barbara est chirurgien-pédiatre dans un hôpital de Berlin-Est. Soupçonnée de vouloir passer à l’Ouest, elle est mutée par les autorités dans une clinique de province, au milieu de nulle part. Tandis que son amant Jörg, qui vit à l’Ouest, prépare son évasion, Barbara est troublée par l’attention que lui porte André, le médecin-chef de l’hôpital. La confiance professionnelle qu’il lui accorde, ses attentions, son sourire... Est-il amoureux d’elle ? Est-il chargé de l’espionner ?

Séance scolaire: version sous-titrée en allemand

Critique

 Entre la tentation de la fuite et la responsabilité morale de la résistance, entre l’échappatoire individuelle et la naissance d’un amour, un hiatus se fait jour, un motif tragique se dessine, dont on taira évidemment la résolution. L’intrigue n’est pas, au demeurant, le fil qui nous relie le plus fortement à ce film. C’est plutôt l’atmosphère que réussit à instaurer le réalisateur qui saisit le plus fortement. Un sens de l’économie remarquable, un usage délibéré de la répétition et une reconstitution à la fois méticuleuse et dépouillée du décor made in RDA permettent, en l’occurrence, à Christian Petzold d’instiller ce climat propre à la société totalitaire, où la suspicion généralisée règle les rapports sociaux et où l’abjection, domestiquée, devient pure affaire de routine. Cette terreur quotidienne est d’autant plus efficacement suggérée que le réalisateur n’a pas cherché à effacer les éventuelles beautés qui les entourent, ni le charme bucolique, dépeint dans une gamme chaude et automnale, de la nature qui lui sert d’écrin. Il est d’autant plus intéressant de comparer le film avec les deux plus grands succès contemporains connus par le cinéma allemand dans son évocation de la RDA : Good Bye Lenin ! (2003), de Wolfgang Becker, et La Vie des autres  (2006), de Florian Henckel von Donnersmarck. Entre la satire enjouée et nostalgique du premier et le drame paranoïde finement ciselé du second, ce que parvient à toucher Barbara est d’une autre nature, peut-être plus juste et plus profonde. Quelque chose qui montrerait l’horreur dans sa trivialité.

Jacques Mandelbaum - Le Monde