Battement de coeur
L'honorable monsieur Aristide dirige une école d'un genre particulier. Il enseigne en effet à de jeunes chômeurs, recrutés par le biais de petites annonces, l'art de devenir pickpocket. Parmi ses dernières recrues, la jeune Arlette, qui vient de s'évader de la maison de redressement d'Amiens. Lors sa première séance de travaux pratiques, la jeune fille est prise la main dans le sac, ou tout comme, par sa victime, ambassadeur de son état. Pour prix de son indulgence, celui-ci exige qu'elle commette pour lui un nouveau larcin. Il s'agit de dérober la preuve de l'infidélité de sa femme...
Film d'actrice rêvé, Battement de coeur est pour Danielle Darrieux l'occasion de décliner un art de la métamorphose étonnant, physiologique. Un battement de cils, et la voici tour à tour ingénue, peste, passive, manipulatrice, piégée, libre. Avec une grâce et un naturel toujours égaux, elle y siffle deux doigts dans la bouche, y regrette ses "vieilles groles", pour, la scène suivante, évoluer en robe de bal, dispenser des "volontiers, cher ami". Elle n'y est jamais autre chose que ce qu'elle est dans tel ou tel plan, pas de conscience, de l'organique seulement. Multiple, changeante, aussi affolante en maillot de bain croisant et décroisant des jambes de déesse avec provocation, que prise la main dans le sac en béret noir et chemisier vichy d'écolière, son Arlette "vole pour être honnête", se transforme pour être aimée, pleure quand elle est heureuse. Idéale.
Clélia Cohen, Les Cahiers du Cinéma, Mars 2002
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