Le dernier jour d'Yitzhak Rabin

De Amos Gitaï
Israël, France - 2015 - vost - 153' - Couleurs
Synopsis

4 novembre 1995. Yitzhak Rabin, Premier ministre israélien, l’homme des accords d’Oslo et Prix Nobel de la Paix, est assassiné à Tel Aviv après un discours pour la paix. Son assassin est un étudiant, juif religieux d’extrême droite. Vingt ans après, le réalisateur Amos Gitaï revient sur cet événement traumatisant avec un nouvel éclairage. Replaçant l’assassinat dans son contexte politique et sociétal, Le dernier jour d’Yitzhak Rabin mêle reconstitutions fictives et images d’archives dans un thriller politique qui réinvente une certaine forme de cinéma.

Critique

Le 4 novembre 1995, le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin est abattu par un jeune intégriste juif. L'assassinat du leader travailliste met un terme à son projet de paix au Proche-Orient : quelques mois plus tard, la droite nationaliste, opposée à tout compromis avec les Palestiniens, remporte les élections... Cette paix, le réalisateur Amos Gitaï y croyait — il lui avait même consacré un cycle de quatre documentaires, Give peace a chance (1) . Vingt ans après, l'espoir s'est transformé en colère. Une colère froide, mais féconde : le cinéma de Gitaï, qui fut souvent plombé, ces dernières années, par des expérimentations formelles trop théoriques, retrouve un nouveau souffle pour raconter les derniers instants d'Yitzhak Rabin.

L'auteur de Kippour entremêle des images d'archives saisissantes, des interviews inédites (dont celles, très émouvantes, de Shimon Peres et de la veuve de Rabin) et des scènes reconstituées avec des acteurs. Le tout relié par un montage si fluide qu'il faut parfois plusieurs secondes pour s'apercevoir que l'on est passé du documentaire à la fiction... Le film, d'une théâtralité et d'une solennité parfois intimidantes, aurait gagné à être raccourci — l'enquête sur les défaillances de la sécurité est interminable. Il n'en reste pas moins passionnant par son évocation de l'atmosphère de haine qui empoisonnait la vie politique israélienne à l'époque, avec ces manifestations où Yitzhak Rabin était comparé à Adolf Hitler. Et ces rabbins fanatiques, qui appelaient à tuer le principal dirigeant du pays, coupable, à leurs yeux, d'oeuvrer à la « destruction » du peuple juif...

A ces paroles délirantes, Gitaï oppose la stature de l'homme d'Etat Rabin, ancien général devenu pacifiste. L'hommage est vibrant, mais laisse un arrière-goût amer. Car la gauche israélienne a été incapable de trouver un successeur à Rabin et de mener à bien son rêve de paix avec les Arabes. Et le boutefeu Benyamin Netanyahou, dont les discours avaient chauffé à blanc les opposants radicaux, est aujourd'hui le chef du gouvernement le plus extrémiste qu'ait connu Israël.

Samuel Douhaire, Télérama

Projeté dans le cadre de

Du 4 Mars 2016 au 13 Mars 2016
Festival du Film et Forum International sur les Droits Humains